La démission en droit ivoirien

Publié le 17 août 2024 à 09:21

La démission se traduit par la rupture volontaire du contrat de travail à durée indéterminée à l’initiative du salarié. Cette décision doit lui venir de plein gré, sans aucune pression de la part de son employeur, et dans un climat reflétant sa pleine présence d’esprit. Les conditions et procédures liées à cet acte font qu’il se distingue de plusieurs autres situations connexes.

En règle générale, un employé n’est démissionnaire que s’il renonce de manière sérieuse, unilatérale et non équivoque au rapport juridique de dépendance qui le lie à son employeur. Toute ambiguïté ramène ainsi à d’autres situations connexes également reconnues et régies par le Code du travail.

La notion de démission est notamment écartée lorsque le salarié a été contraint de manière directe ou indirecte à rompre son contrat de travail, sa liberté de démissionner est alors remise en cause. En cas de menace, d’empêchement, ou de harcèlement, l’acte est requalifié en une prise d’acte de la rupture à l’initiative de l’employeur;( Art 5 du code du travail ivoirien).

Il est d'ailleurs conseillé à l'employé de rédiger une lettre de rupture de contrat de travail en lieu et place d'une lettre de démission. La lettre de rupture vous permettra plus tard de valablement revendiquer en justice, une indemnité de licenciement, une indemnité de préavis et même des dommages et intérêts pour licenciement abusif. Cette situation englobe toutes les formes de décision de rupture qui résultent d’intenses émotions (déception, colère, changement d’humeur…).

Dans ce cas, la démission ne s’apprécie pas immédiatement sur le comportement du salarié. Lorsqu’un abandon de poste fait par exemple suite à une modification de son contrat, il sera licencié et bénéficiera de toutes les indemnités de droit commun. En revanche, lorsque son acte découle d’un simple changement de ses conditions de travail (sans danger), l’employeur peut demander un licenciement pour faute, sans indemnités à payer.

 

 

LE PREAVIS A RESPECTER

Un démissionnaire doit toujours respecter un délai de préavis, sauf dans des cas bien particuliers. Cette période est fixée par le Décret no 96-200 du 7 mars 1996, relatif à la durée du préavis de rupture du contrat de travail en l'absence de convention collective spécifique.

Le non-respect du préavis ouvre droit à des dommages-intérêts au profit de l’employeur.

Le salarié peut toutefois simplement demander à son patron de supprimer le préavis et par la même occasion de renoncer aux indemnités de préavis. Son patron peut également décider de dispenser le travailleur du préavis, mais il devra toujours verser les indemnités inhérentes.

Par ailleurs, il existe d’autres cas de dispense de préavis auxquels un démissionnaire peut se référer :

  • Cas d’une femme enceinte avec une grossesse apparente ;
  • Non-respect de ses obligations par l’employeur notamment en cas de non-paiement de salaire, de modification unilatérale du contrat de travail, d’exposition expresse de l’employé au danger… ;
  • Démission pendant la période d’essai.

Le délai de préavis ne peut être suspendu que par les jours de congés payés, contrairement à l’arrêt maladie, la maternité ou la grève qui ne peuvent pas en faire autant. (Articles 18.4, 18.5, 18.6 et 18.7 du code du travail ivoirien).

Lorsqu’une démission est reconnue dans toutes ses conditions de fond et de forme, le salarié n’est plus lié à aucun rapport juridique de dépendance avec son employeur. Pendant son préavis, il peut, par usage ou convention collective, disposer d'un certain nombre de jours non rémunérées pour la recherche d’un nouvel emploi. À l’issue de son préavis, il perçoit normalement tous les éléments de sa rémunération incluant les indemnités de congés payés, les primes, le 13e mois etc.

Hormis les compensations financières, l’entreprise doit lui remettre un certificat de travail, un dernier bulletin de salaire.

 

 

CAS PRATIQUE

Madame KONAN Amenan Marie-Chantale, avec un salaire moyen mensuel de 782.000 FCFA et embauchée depuis 5 ans, n’a pas bénéficié de son congé annuel de l’année en cours.

L’employeur accorde un mois de salaire comme gratification chaque 31 décembre à ses salariés.

Madame KONAN a démissionné le 31/12/2012 et n’a pas fait le préavis.

Quels seront les droits de Madame KONAN ?

 

 

CORRECTION DU CAS PRATIQUE

Le travailleur qui décide de démissionner ne bénéficie de pratiquement rien comme droits, exceptés :

  1. a) son salaire de présence effective c’est-à-dire le salaire du dernier mois où il a effectivement travaillé ;
  2. b) son indemnité compensatrice de congés payés ;
  3. c) sa gratification à condition que l’employeur accorde la gratification à son personnel en fin d’année ;
  4. d) Exceptionnellement des dommages et intérêts pour l’employeur si la démission est faite dans le seul but de nuire à son employeur.

 

  1. L’indemnité compensatrice de congés

Comme en matière de licenciement, le travailleur a droit à l’indemnité compensatrice de congés payés :

  1. a) Pour les 12 mois, Madame KONAN  a : 12 x 2,2 = 26,4 jours ou 27 jours de congés ;
  2. b) Jours calendaires = 27 x 1,25 = 33,75 ou 34 jours ;
  3. c) L’indemnité compensatrice de congés payés = 782 000 FCFA x 34 / 30 = 886.267 FCFA

 

  1. L’indemnité compensatrice de préavis

Madame KONAN n’a pas fait le préavis prescrit par la loi. Elle versera l’indemnité compensatrice de préavis correspondant à son employeur, soit un (1) mois de salaire pour les personnes payées par mois et qui ont moins de 6 ans d’ancienneté au sein de l’entreprise.

Travailleurs payés au mois et classés dans les cinq premières catégories

  1. a) Jusqu’à 6 ans d’ancienneté dans l’entreprise : 2 mois
  2. b) De 11 ans à 16 ans d’ancienneté dans l’entreprise : 3 mois
  3. c) Au-delà de 16 ans d’ancienneté dans l’entreprise : 4 mois

Indemnité compensatrice de préavis à verser à l’employeur : 782.000 FCFA x 1 = 782.000 FCFA

 

  1. La gratification

Madame KONAN aura droit à un mois de salaire puisque la démission est intervenue le 31 décembre.

Gratification : 782.000 FCFA x 1 = 782.000 FCFA

Les droits que percevra Madame KONAN sont : 782 000 FCFA + 886 267 FCFA + 782 000 FCFA - 782 000 FCFA (pour le préavis non exécuté) = 1.668.267 FCFA

 

 

 

 

 

Par Luc KOUASSI

𝑱𝒖𝒓𝒊𝒔𝒕𝒆 𝑪𝒐𝒏𝒔𝒖𝒍𝒕𝒂𝒏𝒕 𝑩𝒊𝒍𝒊𝒏𝒈𝒖𝒆 | 𝑭𝒐𝒓𝒎𝒂𝒕𝒆𝒖𝒓 | 𝑺𝒑𝒆́𝒄𝒊𝒂𝒍𝒊𝒔𝒕𝒆 𝒆𝒏 𝒓𝒆́𝒅𝒂𝒄𝒕𝒊𝒐𝒏 𝒅𝒆 𝒄𝒐𝒏𝒕𝒓𝒂𝒕𝒔, 𝒅'𝒂𝒄𝒕𝒆𝒔 𝒆𝒙𝒕𝒓𝒂𝒋𝒖𝒅𝒊𝒄𝒊𝒂𝒊𝒓𝒆𝒔, 𝒅'𝒂𝒓𝒕𝒊𝒄𝒍𝒆𝒔 𝒋𝒖𝒓𝒊𝒅𝒊𝒒𝒖𝒆𝒔 𝒆𝒕 𝒅𝒆𝒔 𝒒𝒖𝒆𝒔𝒕𝒊𝒐𝒏𝒔 𝒓𝒆𝒍𝒂𝒕𝒊𝒗𝒆𝒔 𝒂𝒖 𝒅𝒓𝒐𝒊𝒕 𝒅𝒖 𝒕𝒓𝒂𝒗𝒂𝒊𝒍 | 𝑷𝒐𝒍𝒊𝒕𝒊𝒔𝒕𝒆 𝒆𝒏 𝒇𝒐𝒓𝒎𝒂𝒕𝒊𝒐𝒏 | 𝑩𝒆́𝒏𝒆́𝒗𝒐𝒍𝒆 𝒉𝒖𝒎𝒂𝒏𝒊𝒕𝒂𝒊𝒓𝒆.

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